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qu’elle devait à elle-même, à la royauté, au sang de sa mère Marie-Thérèse, au peuple qui la regardait. Après avoir pleuré au berceau de son fils, de sa fille, aux genoux du roi, dans les bras de sa sœur et de son amie, elle essuyait sur ses joues la trace des larmes, et faisait disparaître la rougeur de ses yeux. Elle reparaissait devant la foule, sérieuse mais tranquille, attendrie mais ferme, ayant un cœur, sans doute, mais le possédant.

Telle fut Marie-Antoinette pendant cette crise de vingt-quatre heures, succédant à tant de crises qui auraient pu épuiser son courage : femme comme toutes les femmes, mieux inspirée par la nature que par la politique, plus faite pour supporter héroïquement que pour diriger les circonstances extrêmes, plus à sa hauteur dans l’action que dans le conseil.


II

Le roi avait fait appeler Rœderer, procureur-syndic du département de Paris. Pétion n’était pas encore au château. Il arrive enfin, rend compte au roi de l’état de Paris, refuse de la poudre au commandant général Mandat, qui se plaint à lui de n’avoir que trois coups à tirer par homme. Sous prétexte de l’extrême chaleur qui l’incommode dans le cabinet du roi, Pétion sort, entraîne Rœderer : ils descendent ensemble dans le jardin. Pétion est entouré d’officiers municipaux affidés et de jeunes gardes nationaux qui chan-