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que les citoyens de Paris. Les Suisses furent massés dans le vestibule. Leur drapeau était là ! Assis sur des bancs et sur les marches de l’escalier, leurs fusils dans les mains, ils y passèrent dans un profond et martial silence les premières heures de la nuit. La réverbération des flambeaux sur leurs armes, le bruit des crosses de fusil retentissant de temps en temps sur le marbre, le qui vive à voix sourde des sentinelles, donnaient au palais l’aspect d’un camp devant l’ennemi. Les uniformes rouges de ces huit cents Suisses, assis ou couchés sur les paliers, sur les degrés, sur les rampes, faisaient ressembler d’avance l’escalier des Princes à un torrent de sang. Indifférents à toute cause politique, républicains prêts à combattre contre la république, ces hommes n’avaient pour âme que la discipline, et pour opinion que l’honneur. Ils allaient mourir pour leur parole, et non pour leur idée ou pour leur patrie. Mais la fidélité est une vertu par elle-même ; cette indifférence des Suisses pour la cause du roi ou du peuple rendit leur héroïsme non pas plus saint, mais plus militaire. Ils n’eurent pas le dévouement du patriote, ils eurent celui du soldat.


XIII

À l’exception de ces Suisses, commandés par Maillardoz, Bachmann, d’Erlach, intrépides officiers, les autres troupes éparses dans les jardins et dans les cours, gendarmerie, canonniers, gardes nationaux, ne présentaient ni nombre,