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troupe de ligne, l’artillerie, marchèrent de tous les points du département. Le choc fut sanglant, la victoire disputée. Cependant l’insurrection parut s’émouvoir et couva sourdement dans la Bretagne pour éclater plus tard. C’était la première étincelle de la grande guerre civile.


II

Elle éclata en même temps, mais moins obstinée, sur un autre point du royaume. Un gentilhomme nommé Dusaillant et un prêtre nommé l’abbé de La Bastide rassemblèrent, au nom du comte d’Artois, trois mille paysans dans le Vivarais.

Ce pays, obstrué de montagnes, percé de défilés étroits, raviné de torrents, palissadé de forêts de sapins, est une citadelle naturelle élevée par la nature entre les plaines du bas Languedoc et les belles vallées du Rhône et de la Saône. Lyon est sa grande capitale. L’esprit catholique et sacerdotal de cette ville toute romaine régnait dans ces montagnes. Les nombreux châteaux qui commandent les vallées appartenaient à une noblesse très-rapprochée par le sang et par les mœurs de la bourgeoisie, et se confondant par ses occupations rurales et par la religion avec le peuple des campagnes. Les gentilshommes n’étaient que les premiers entre les paysans. Unis d’intérêts avec le clergé, ils agitaient par lui le pays.

Dusaillant s’empara du château gothique et crénelé de