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IV

Cet attentat avait surtout révolté l’armée. Le roi est son chef. Les outrages faits au roi lui semblent toujours faits à elle-même. Quand l’autorité souveraine est violée, chaque officier tremble pour la sienne. D’ailleurs l’honneur français fut toujours la seconde âme de l’armée. Les récits du 20 juin, qui arrivaient de Paris et qui circulaient dans les camps, montraient aux troupes une reine belle et malheureuse, une sœur dévouée, des enfants naïfs, devenus pendant plusieurs heures le jouet d’une populace cruelle. Les larmes de ces enfants et de ces femmes tombaient sur le cœur des soldats ; ils brûlaient de les venger et demandaient à marcher sur Paris.

La Fayette, campé alors sous le canon de Maubeuge, favorisa ces manifestations dans son armée. L’attentat impuni du 20 juin, en lui annonçant le triomphe des Jacobins et des Girondins, lui annonça en même temps le complet anéantissement de son influence. Il rêva généreusement le rôle de Monk. Soutenir le roi qu’il avait abaissé lui parut une tentative digne à la fois de sa situation de chef de parti et de sa loyauté de soldat. Sûr d’entraîner le faible Luckner, dont le corps d’armée était à Menin et à Courtray, La Fayette lui envoya Bureau de Puzy pour l’informer de sa résolution de se rendre à Paris, et de chercher à entraîner la garde nationale et l’Assemblée pour écraser les Ja-