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III

Plus de vingt mille citoyens se portèrent spontanément chez des officiers publics pour y signer une pétition qui demandait justice de ces crimes. L’administration du département décida qu’il y avait lieu de poursuivre les auteurs des désordres. L’Assemblée décréta qu’à l’avenir les rassemblements armés sous prétexte de pétition seraient dispersés par la force. Les Jacobins et les Girondins réunis tremblèrent, se turent, ou se bornèrent à se réjouir dans le secret de leurs conciliabules de l’avilissement du trône. La sensibilité s’éteignit dans le cœur même des femmes. L’esprit de parti rendit cruel un cœur d’épouse et de mère devant le supplice d’une mère et d’une épouse outragée. « Que j’aurais voulu voir sa longue humiliation, et combien son orgueil a dû souffrir ! » s’écria madame Roland en parlant de Marie-Antoinette. Ce mot était un crime de la politique contre la nature. Madame Roland le pleura plus tard ; elle en comprit la cruauté le jour où des femmes féroces firent leur joie de son martyre, et battirent des mains devant la charrette qui la conduisait à l’échafaud.

Pétion publia une justification de sa conduite. Cette justification l’accusa davantage. Quand il parut le 21 aux Tuileries, accompagné de quelques officiers municipaux, il fut accablé de mépris, de reproches et de menaces. Le bataillon des Filles-Saint-Thomas, composé d’hommes dévoués à