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de brigands, brûler le roi dans son palais, et égorger nos atroces représentants sur leurs siéges !… » Robespierre m’écoutait avec effroi. Il pâlit et garda longtemps le silence. Je m’éloignai. J’avais vu un homme intègre ; je n’avais pas rencontré un homme d’État. » Ainsi le scélérat avait fait horreur au fanatique ; Robespierre avait fait pitié à Marat.


IV

Ces premières luttes entre les Jacobins et la Gironde donnaient à l’habile Dumouriez un double point d’appui pour sa politique. L’inimitié de Roland, de Clavière et de Servan ne l’inquiétait plus dans le conseil. Il balançait leur influence par son alliance avec leurs ennemis. Mais les Jacobins voulaient des gages, il les leur offrait dans la guerre. Danton, aussi violent et plus politique que Marat, ne cessait de répéter que la Révolution et les despotes étaient irréconciliables, et que la France n’avait de salut à espérer que de son audace et de son désespoir. La guerre, selon Danton, était le baptême ou le martyre par lequel devait passer la liberté comme une religion nouvelle. Il fallait retremper la France dans le feu, pour qu’elle se purifiât des souillures et des hontes de son passé.

Dumouriez, d’accord en cela avec La Fayette et les Feuillants, voulait aussi la guerre ; mais c’était comme un soldat, pour y conquérir la gloire et pour en foudroyer ensuite les factions. Depuis le premier jour de son ministère,