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XVI

« Sire, disait Roland dans cette lettre fameuse, les choses ne peuvent rester dans l’état où elles sont : c’est un état de crise, il faut en sortir par une explosion quelconque. La France s’est donné une constitution, la minorité la sape, la majorité la défend. De là une lutte intestine, acharnée, où personne ne reste indifférent. Vous jouissiez de l’autorité suprême, vous n’avez pas pu la perdre sans regrets. Les ennemis de la Révolution font entrer vos sentiments présumés dans leurs calculs. Votre faveur secrète fait leur force. Devez-vous aujourd’hui vous allier aux ennemis ou aux amis de la constitution ? Prononcez-vous une fois pour toutes. Royauté, clergé, noblesse, aristocratie, doivent abhorrer les changements qui les détruisent ; d’un autre côté, le peuple voit le triomphe de ses droits dans la Révolution, il ne se les laissera plus arracher. La déclaration des droits est devenue le nouvel Évangile. La liberté est désormais la religion du peuple. Dans ce choc d’intérêts opposés, tous les sentiments sont devenus extrêmes ; les opinions ont pris l’accent de la passion. La patrie n’est plus une abstraction, c’est un être réel auquel on s’est attaché par le bonheur qu’elle promet et par les sacrifices qu’on lui a faits. À quel point ce patriotisme va-t-il s’exalter au moment prochain où les forces ennemies du dehors vont se combiner pour l’attaquer avec les intrigues de l’intérieur ! La colère de