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des Pères ; en d’autres termes, Mornay aurait corrompu et tronqué le texte des auteurs qu’il citait, pour les faire parler en faveur de sa thèse.[1]

C’était un moyen commode et infaillible de ternir la réputation de l’écrivain huguenot, et en même temps d’éblouir le commun des lecteurs qui n’y entendaient pas malice. Elie Benoît fait à ce propos une remarque fort judicieuse. « Comme ces accusations, dit-il, sont difficiles à expliquer avec ceux qui ne sont pas capables d’examiner à fond les matières et les auteurs, on s’en servait comme de l’unique argument propre pour la séduction de ceux qu’on voulait engager à changer de religion. C’est ainsi qu’on mène le peuple dans les affaires qui sont au-dessus de sa compétence, et on lui persuade quelquefois qu’il est impossible de les résoudre parce qu’il n’en a pas la capacité. Cette fraude a régné en France dans la conduite des controversistes depuis le commencement jusqu’à la fin.[2] »

Les catholiques ne purent obtenir cependant que l’ouvrage fût condamné par les parlements. — La réponse de M. Dassiz, premier Président à Bordeaux,

  1. L’auteur du Discours véritable P. M. N. R. S. D. P. P. emploie des expressions encore plus fortes. « Les passages (du livre de Mornay) sont : les uns tronquez, les aultres du tout faulx et inventez à plaisir, les aultres pris tout au contraire du sens évident des autheurs, les aultres si abusivement citez qu’il a pris l’objection faicte par l’auteur pour la résolution. »
  2. Histoire de l’Édit de Nantes. Tome I, page 342.