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souvenirs

qu’elles leur adressent, elles rejettent aussitôt leurs mamelles par-dessus leurs épaules, et, s’élançant à leur poursuite, les forcent d’abandonner et charrue et troupeau.

Les Martes ont pour voisins des espèces de géants, connus également dans le pays sous le nom de Martes ou Morses. La tradition ne dit point quelle parenté, quelle alliance, quelles relations peuvent exister entre les Martes femelles et les Martes mâles. Quoi qu’il en soit, la force de ces derniers tient du prodige. Ce sont eux qui, en se jouant, ont apporté et mis debout tous les dolmens, menhirs et cromlekhs de la contrée.

On raconte, à ce sujet, que, tandis que cinq de ces géants procédaient à l’érection des piliers du dolmen de Monthorneau, situé dans le voisinage, l’un d’entre eux, trop confiant en ses forces, se vanta d’enlever, seul, à bout de bras, et de poser sur les supports la pierre immense qui sert de plateforme au monument. Quand ce fut au fait et au prendre, non-seulement il ne put en venir à bout, mais, après avoir réclamé l’aide de ses quatre compagnons, il ne parvint pas même à élever le côté dont il s’était chargé aussi haut que les autres, et sa forfanterie lui valut une rupture de reins et les railleries de ses camarades. Ainsi s’explique la déclivité que l’on remarque dans le niveau de la table du dolmen de Montborneau[1].

Ces prodigieux travaux de nos Marses rappellent que les traditions gauloises « veulent que ce soient les géants qui aient apporté les pierres magiques douées de vertus bienfaisantes[2] ; » ils rappellent — aussi que, dans plusieurs de nos

  1. Voy., pour tout ce qui concerne les Martes, les p. 107, 139 et 140 des Esquisses pittoresques de l’Indre, par M. de la Tramblais, et la p. 21 du t. I de l’Histoire du Berry, par M. Raynal.
  2. Geoffroi de Monmouth, liv. V, ch. v ; — Henri Martin, Histoire de France, t. I, p. 52.