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du vieux temps

lus de Presles et de Cluis-Dessous (Indre) doivent être de ce nombre.

Reprenons notre thème.

Dans la commune de Saint-Benoît-du-Sault, au pied du coteau que couronnent les tourelles du château de Montgarnaud, se trouve une profonde ravine dont le lit et les bords sont encombrés de roches immenses aux formes tourmentées et fantastiques et entre lesquelles bondissent les bruyantes cascatelles du Portefeuille. On assure qu’en ce lieu pittoresque il existe toute une peuplade de fées et que leurs voix, étrangement accentuées, se mêlent, pendant les nuits d’orage, aux voix mugissantes du torrent. Leur principale demeure, que l’on appelle l’Aire aux Martes, est un vrai palais de cristal, puisqu’elle est située sous les brillants arceaux de la cascade.

Malgré leur nature divine, il paraîtrait que les Martes sont assujetties aux nécessités de la vie humaine, car, par les temps de sécheresse, lorsque l’eau du ruisseau est moins abondante, on aperçoit très-bien, au fond de son lit et creusés dans le roc, quelques-uns de leurs ustensiles culinaires : leur chaudron et leur poêlon, entre autres, sont très-visibles. — C’est ainsi qu’à Sassenage, près de Grenoble, les fées ont un four où elles font cuire des gâteaux.

Les Martes de Montgarnaud ont une tenue et des habitudes tout à fait excentriques. Au dire des gens de l’endroit, ce sont, en général, de grandes femmes maigres, tannées et débraillées comme des bohèmes. Leurs longs cheveux, noirs et roides, tombent d’un seul jet jusque sur leurs talons ; leurs mamelles, presque aussi longues, leur battent les genoux. C’est en cet état, et perchées sur quelque monticule, sur la table d’un dolmen, ou sur la crête d’un peulvan, qu’elles apparaissent parfois au laboureur qui travaille dans la plaine, au berger qui paît ses brebis au penchant des coteaux. Si ces braves gens ne répondent point aux appels effrontés