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Quand il vit, demi-nue et splendide, une femme
Qui venait se baigner au fleuve, et dans son âme
Il sentit un tel choc d’amour, un tel désir,
Qu’il souffrit et trembla, comme près de mourir…
Des esclaves armés accoururent ; le prêtre
A pas lents s’éloigna, gardant en tout son être,
A l’extase, au désir mêlé, ce tremblement
Qu’il avait pris soudain dans le rayonnement,
Dans l’éclat foudroyant de cette forme nue.

Il apprit d’où venait cette femme inconnue :
Courtisane fameuse, elle était de Memphis.
Dès lors ne rêvant plus qu’à la tige de lis
De ce long corps divin, adorable, sans tache,
Il devint chaque jour plus débile et plus lâche.
Il lutta, ses efforts demeuraient superflus ;
Il aimait ses enfants, il ne les aima plus ;
Il écartait, brutal, leurs petites mains douces ;
Sa femme dit : « Qu’as-tu, pour que tu nous repousses ? »
Et son mal à la fin le tortura si fort,
Qu’il comprit que l’Amour, puissant comme la Mort,
Pouvait tuer aussi, non moins qu’elle inflexible !…

Alors un jour, poussé du désir invincible,