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28 L’ILLUSION

PRESSENTIMENTS


LE vent de l’infini pousse et berce la terre :
Aimons, le jour fait place aux langueurs de la nuit ;
Sous les cieux étoilés, effrayants de mystère,
Le grand vaisseau poursuit sa route et va sans bruit.

Aimons, je ne veux plus penser : dès que je pense,
Je sens, comme un marin, que j’ai là sous mes pas,
Tombe ouverte toujours, l’horreur du gouffre immense,
D’où mon cadavre, un soir, ne remontera pas.

— Nous contemplons l’espace, et, tandis que la lune,
Cette morte au cœur froid, illumine nos fronts,
Nous frissonnons, saisis d’une angoisse commune,
Comme deux condamnés à mort, et nous pleurons.