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l’habit. Revenons à la chasse du Castor durant l’hiver que tu regardes comme une chose afreuse, pendant que nous y trouvons toute sorte de plaisir & les commoditez d’avoir toutes sortes de marchandises pour leurs peaux. Déja nos esclaves ont la plus grande peines (si tant est qu’il y en ait) tu sçais que la chasse est le plus agréable divertissement que nous ayons : celle de ces Animaux estant tout à fait plaisante, nous l’estimons aussi plus que toute autre. Nous faisons, dis-tu, une guerre pénible ; j’avoue que les François y périroient, parce qu’ils ne sont pas accoutumez de faire de si grands voyages à pied ; mais ces courses ne nous fatiguent nullement ; il seroit à souhaiter pour le bien de Canada que vous eussiez nos talens. Les Iroquois ne vous égorgeroient pas comme ils font tous les jours, au milieu de vos Habitations. Tu trouves aussi que le risque de nos petits Canots dans nos Voyages est une suite de nos miséres ; il est vray que nous ne pouvons pas quelquefois nous dispenser d’aller en Canot. Puisque nous n’avons pas l’industrie de bâtir des Vaisseaux ; mais ces grands Vaisseaux que vous faites ne périssent pas moins que nos Canots ; tu nous reproches encore que nous couchons sur la dure à la belle étoile, quand nous sommes au pied des Villages des Iroquois ; j’en conviens ; mais aussi je sçay bien que les soldats en France ne sont pas si commodément que les tiens sont ici, & qu’ils sont bien contrains de se gîter dans les Marais & dans les fossez à la pluye & au vent. Nous-nous enfuyons,