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de 60 ans. Alors ils pourroient confesser, prêcher, visiter sans scrupule les familles, par leur exemple édifier tout le Monde. Alors, dis-je, ils ne pourroient séduire ni femmes ni filles. Ils seroient sages, modérés, considérez par leur vieillesse & par leur conduite, & la Nation n’y perdroit rien, puis qu’à cet âge-là on est hors d’état de faire la guerre.

Lahontan.

Je t’ay déja dit une fois qu’il ne falloit pas comprendre tout le Monde en des choses trés-peu de gens ont part. Il est vray qu’il y en peut avoir quelques-uns qui ne se font Moines ou Prêtres que pour subsister commodément, & qui abandonnant les devoirs de leur Ministére, se contentent d’en tirer les revenus. J’avoüe qu’il y en a d’yvrognes, de violens, & d’emportés dans leurs actions & dans leurs paroles, qu’il s’en trouve d’une avarice sordide, & d’un attachement extréme à leur intérest ; d’orgueilleux, d’implacables dans leurs haines, de paillards, de débauchez, de jureurs, d’ypocrites, d’ignorans, de mondains, de médisans, &c. mais le nombre en est trés petit, parce qu’on ne reçoit dans l’Eglise que des gens sages dont on soit bien assûré, on les éprouve, & on tâche de connoistre le fond de leur ame avant que de les y admétre. Néanmoins, quelque précaution qu’on prenne, il ne se peut faire qu’on n’y soit trompé quelquefois ; C’est pourtant un malheur, car lorsque ces vices paroissent dans la conduite de ces gens-là, c’est asseurément le plus grand des scandales ; dez là les pa-