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res marchandises qu’ils ont, comme nous faisons, lorsque nous les avons achetées d’eux, & que nous les brûlons en leur présence. II. Pour le travail des jours de la grande Priére, je ne conçois pas que vous fassiez de la diférence de ceux-là aux autres ; car j’ay veu vint fois des François qui trafiquoient des péleteries, qui faisoient des filets ; qui joüoient, se quérelloient, se batoient, se fouloient, & faisoient cent autres folies. III. Pour la vénération de vos Péres, c’est une chose extraordinaire parmi vous de suivre leurs conseils ; vous les laissez mourir de faim, vous-vous séparez d’eux, vous faites cabane à part ; vous étes toûjours prêts à leur demander, & jamais à leur donner ; & si vous espérez quelque chose d’eux, vous leur souhaitez la mort, ou du moins vous l’attendés avec impatience. IV. Pour la continence envers le sexe, qui sont ceux parmi vous, à la réserve des Jésuites, qui l’aïent jamais gardée ? Ne voïons-nous pas tous les jours vos jeunes gens, poursuivre nos filles & nos femmes jusques dans les champs, pour les séduire par des présens, courir toutes les nuits de Cabane en Cabane dans notre Village pour les débaucher, & ne sçais-tu pas toy même combien d’affaires se sont passées parmi tes propres soldats ? V. A l’égard du meurtre, il est si ordinaire parmi vous, il est si fréquent, que pour la moindre chose, vous métez l’épée à la main, & vous-vous tuez. Quand j’estois à Paris, on y trouvoit toutes les nuits des gens percez de coups ; & sur les chemins de là à la Rochelle, on me dit qu’il faloit que je prisse bien garde de perdre la vie.