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pour vous faire connoistre la maniére dont les Espagnols en usent envers leurs Amis. Si cent Gentishommes m’avoient régalé, il n’y auroit aucune diférence de ce que je vous ay dit, si ce n’est, peut-estre, en la bonne chére. Car pour la Cérémonie, c’est toujours la même chose chez les uns, comme chez les autres. Ainsi, par cette Description vous sçavez tout ce qui se pratique en Espagne, en pareille occasion. Je croy vous avoir dit que les Espagnoles nous traitent d’indiscrets ; elles n’ont, peut-être, pas tout le tort. Car toutes les Femmes de l’Europe tiennent le même langage. Voici quelques vers Espagnols qu’un fou de Poëte a faits sur cette matiére, il y a cinquante ans.

Los discretos Espagnoles,
Los maridos Zelozos,
Hazen en Callados Gozos
Orejas de Caracoles.
No son tales los Francezes,
Tanto no pueden cubrir,
Antes mas quieren mil vezes,
No hazer, que no dezir.

Cela veut dire en bonne prose, que les discrets Espagnols aident aux Femmes à coëfer leurs Maris, par des embrassemens secrets. Que les François au contraire ne peuvent rien cacher, car ils aiment mille fois mieux ne pas faire le coup, que de ne pas le dire. Voila, Monsieur, à peu prez,