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monde, & sur le changement qu’elle y a aporté ; si tu pressois les Caractéres de vérité, de sincérité, & de divinité qui se remarquent dans ces Ecritures ; en un mot, si tu prenois les parties de nostre Réligion dans le détail, tu verrois & tu sentirois que ses dogmes, que ses préceptes, que ses promesses, que ses menaces, n’ont rien d’absurde, de mauvais, ni d’opposé aux sentimens naturels, & que rien ne s’accorde mieux avec la droite Raison, & avec les sentimens de la Conscience.

Adario.

Ce sont des contes que les Jésuites m’ont fait déjà plus de cent fois ; ils veulent que depuis cinq ou six mille ans, tout ce qui s’est passé, ait été écrit sans altération. Ils commencent à dire la maniere dont la terre & les cieux furent créez ; que l’homme le fut de terre, la femme d’une de ses côtes ; comme si Dieu ne l’auroit pas faite de la même matiére ; qu’un Serpent tenta cet homme dans un Jardin d’arbres fruitiers, pour lui faire manger d’une pomme, qui est cause que le grand Esprit a fait mourir son Fils exprez pour sauver tous les hommes. Si je disois qu’il est plus probable que ce sont des fables que des verités, tu me payerois des raisons de ta Bible ; or l’invention de l’Ecriture n’a été trouvée, à ce que tu me dis un jour, que depuis trois mille ans, l’imprimerie depuis quatre ou cinq siécles, comment donc s’assurer de tant d’événemens divers pendant plusieurs siécles ? Il faut assurément estre bien crédule pour ajoûter foi à tant de rêveries contenues