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viennent méchans : 5. Que la vie est un songe, & la mort un réveil, aprés lequel, l’ame voit & connoit la nature & la qualité des choses visibles & invisibles. 6. Que la portée de nôtre esprit ne pouvant s’étendre un pouce au dessus de la superficie de la terre, nous ne devons pas le gâter ni le corrompre en essayant de pénétrer les choses invisibles & improbables. Voilà, mon cher Frére, quelle est nôtre Créance, & ce que nous suivons exactement. Nous croyons aussi d’aller dans le païs des ames aprés nôtre mort ; mais nous ne soupçonnons pas, comme vous, qu’il faut nécessairement qu’il y ait des séjours & bons & mauvais aprés la vie, pour les bonnes ou mauvaises ames, puisque nous ne sçavons pas si ce que nous croyons être un mal selon les hommes, l’est aussi selon Dieu ; si vôtre Religion est diférente de la nôtre, cela ne veut pas dire que nous n’en ayons point du tout. Tu sçais que j’ay été en France, à la nouvelle Jork & à Quebec, où j’ay étudié les mœurs & la doctrine des Anglois & des François. Les Jésuites disent que parmi cinq ou six cens sortes de Religions qui sont sur la terre, il n’y en a qu’une seule bonne & véritable, qui est la leur, & sans laquelle nul homme n’échapera d’un feu qui brûlera son ame durant toute l’éternité ; & cependant ils n’en sçauroient donner des preuves.

Lahontan.

Ils ont bien raison, Adario, de dire qu’il y en a de mauvaises ; car, sans aller plus loin, ils n’ont qu’à parler de la tienne. Celui qui ne connoît point les veritez de la Religion