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que fieffé, & qu’il fût ensuite question d’embraser la Ville de Rome, j’y métrais le feu le premier par l’obeïssance que je devrois au grand-Seigneur. Changeons de propos. Les Loix de Danemarc contenues dans le Livre Latin que je vous envoye, vous paraîtront si claires, si sages si distinctes, qu’elles semblent avoir esté dictées par la bouche de St. Paul ; d’où vous conclurez ensuite que ce Païs n’est guère favorable aux Procureurs, Avocats, & autres gens de chicane. J’avoue que l’article des rencontres vous semblera déraisonable, comme il l’est effectivement, car au bout du compte, il est presque aussi desavantageux de tuer son ennemi, que de se laisser tuer soy même. La Cour de Danemarc est aussi belle qu’aucune autre de l’Europe, à proportion de sa grandeur. Les équipages des Seigneurs qui la composent sont des plus magnifiques. Ce qui est singulier, c’est qu’il n’est permis qu’aux Personnes de la Famille Royale de donner des Livrées rouges à leurs Laquais. L’heure de la Cour est depuis midi jusqu’à une heure & demie, ou environ. Le Roy se fait voir pendant ce temps là dans un Salon rempli de gens d’une propreté achevée, on n’y voit que des Habits brodez & galonez à la mode & de bon goût. Les Ministres étrangers s’y trouvent régulièrement : car le Roy leur fait l’honneur de les écouter avec plaisir. On y trouve peu de Chevaliers de l’Eléphant, cet Ordre n’étant conféré qu’aux premiers du Royaume. On peut dire qu’il est aujourd’huy le plus noble de tous ceux de