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d’abord l’oreille des Etrangers, mais au fond elle a quelque chose d’agreable, & qui plaît lors qu’on y est un peu acoutumé. Il n’en est pas de même de leur Musique vocale, car elle est si rude, & ses dissonances sont si mal suivies que le chant des Corneilles est plus mélodieux. Tous les motets qu’ils chantent dans les Eglises sont en langue Castillane ; aussi bien que leurs Pastorales, & la plûpart de leurs Chansons. Ils tâchent d’imiter les maniéres des Espagnols, autant qu’il leur est possible ; même jusqu’au Cérémoniel de leur Cour, auquel on se conforme si ponctuelement, que les Ministres seroient au désespoir d’en retrancher les moindres formalitez. L’Habit de Cérémonie du Roy & des Seigneurs est semblable à celui de nos Financiers, étant composé d’un just-au-corps noir, acompagné d’un Manteau de même couleur, d’un grand colet ou rabat de point de Venise, d’une perruque longue avec l’épée & la dague. On donne aux Ambassadeurs le Tître d’Excellencia & aux Envoyez & Residens celui de Senhoria. Le port de Lisbone est grand, seur & commode, quoique l’entrée en soit extrémement difficile ; les vaisseaux moüillent dans le Tage entre la Ville & le Château d’Almada à 18. brasses d’eau sur un fond de bonne tenue. Cette Rivière, que les Portugais appellent, O Rey dos riôs c’est à dire le Roy des Riviéres, a prez d’une lieüe de largeur dans cet endroit là ; où la marée monte ordinairement 12. pieds à pic, & plus de dix lieües en avant vers la source. Il est expressement deffendu à tous Capitaines de Vaisseaux de guerre & Marchans, étrangers ou de la Na-