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cette précaution, elles se divertissent avec des gens sages aux dépens de ces foux. Ceux-ci sont indispensablement obligez d’entretenir à force de présens l’amour & la fidélité prétendues de ces Lais, dont la possession est d’une cherté inconcevable. Les Religieuses reçoivent des visites assez fréquentes de leurs Devotos, qui ont plus de passion pour elles que pour les femmes du monde ; comme il paroît par les jalouzies, les quérelles, & mille autres désordres que l’amour peut causer entre des Rivaux. Les Parloirs n’avoient autrefois qu’une grille simple, mais depuis que Milord Grafton suivi de quelques Capitaines de sa flotte, eut la curiosité de toucher les mains &c. des Religieuses d’Odivelas, le Roy ordonna qu’on mît une double grille aux Parloirs de tous les Couvens du Royaume. Il supprima presque aussitôt le droit des Devotos par la défence qu’il fit d’aprocher des Monastéres, sans cause légitime, qu’il est facile de supposer, lorsqu’on est assez fou de soupirer pour ces pauvres filles. Les Portugais ont l’esprit vif, ils pensent hardiment, & leurs expressions égalent assez bien la justesse de leurs idées. Il se trouve chez eux de bons Phisiciens, & bons Casuistes. Le célèbre Camœns étoit, sans contredit, un des plus illustres Citoyens du Parnasse. La fécondité de ses belles pensées, le choix de ses paroles, & l’air poli & dégagé avec lequel il a parlé, ont charmé tous ceux à qui la Langue Portugaise est assez familiére. Il est vray qu’il a eû le malheur d’avoir été brocardé par Moreri & par quel-