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que mon affaire ne consiste qu’à n’avoir pas soufert les afronts d’un Gouverneur qu’ils protégent, pendant que cens autres Officiers, qui ont eu des affaires mille fois plus criminelles que la mienne, en ont été quittes pour trois mois d’absence. La raison de ceci est qu’on fait moins de quartier aux gens qui ont le malheur de déplaire à Messieurs de Pontchartrain, qu’à ceux qui contreviénent aux ordres du Roy. Quoiqu’il en soit, je trouve dans mes malheurs la consolation de joüir en Angleterre d’une espéce de liberté, dont on ne joüit pas ailleurs ; car on peut dire que c’est l’unique Païs de tous ceux qui sont habitez par des peuples civilisez, où cette liberté paroit plus parfaite. Je n’en excepte pas même celle du cœur, etant convaincu que les Anglois la conservent fort précieusement ; tant il est vray que toute sorte d’esclavage est en horreur à ces Peuples, lesquels témoignent leur sagesse par les précautions qu’ils prénent pour s’empêcher de tomber dans une servitude fatale.