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comme parmi vous autres. Nous voyons tous les jours des Hurons de cinquante ans, qui ont moins d’esprit & de discernement que des jeunes filles. Il y en a de supersticieux, comme parmi vous autres. Car ils croyent premiérment que l’esprit des songes est l’Ambassadeur & le Messager, dont le grand Esprit se sert pour avertir les hommes de ce qu’ils doivent faire de nos Jongleurs, ce sont, des Charlatans & des Imposteurs, comme vos Médecins ; avec cette différence qu’ils se contentent de faire bonne chére aux dépens des malades, sans les envoyer dans l’autre monde, en reconnoissance de leurs festins & de leurs présens.

Lahontan.

Ha ! pour le coup, mon intime Adario, je t’honore au delà de tout ce que je pourrois t’exprimer ; Car tu raisonnes comme il faut. Jamais tu n’as mieux parlé. Tout ce que tu dis des sueurs est effectivement vray. Je le connois par expérience tellement bien, que de ma vie je n’useray d’autre reméde que de celuy-là. Mais je ne sçaurois soufrir pourtant que tu te récries si fort contre la saignée ; car il me souvient que tu me dis, il y a quinze jours, cent raisons sur la nécessité de conserver notre sang, puisqu’il est le trésor de la vie. Je ne te contredirai pas tout à fait sur cela, mais je te dirai pourtant que vos remédes contre les pleuresies & les fluxions ne réüssissent quelquefois que par hazard ; puisque de vint malades il