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gues pourroient engendrer de mauvaises humeurs dans le sang, sortiroient par les pores de la chair. Alors, adieu la médecine & tous ses poisons. Or, ce que je te dis, mon cher Frére, est plus clair que le jour ; ce raisonement n’est pas pour les ignorans. Car ils ne parleroient que de pleurésies & de rhumatismes à l’issue de ce reméde. C’est une chose étrange qu’on ne veüille pas écouter la réponse que nous faisons à l’objection que vos Médecins nous font sur cette maniére de suer. Il est constant, mon cher Frére, que la Nature est une bonne Mére, qui voudroit que nous vécussions éternellement. Cependant nous la tourmentons si violemment qu’elle se trouve quelquefois tellement afoiblie, qu’à peine a-t-elle la force de nous secourir. Nos débauches & nos fatigues engendrent de mauvaises humeurs, qu’elle voudroit pouvoir chasser de nos corps, s’il luy restoit assez de vigueur pour en ouvrir les portes, qui sont les pores de la chair. Il est vray qu’elle en chasse autant qu’elle peut par les urines, par les selles, par la bouche, par le nez & par la transpiration insensible ; mais la quantité des sérositez est quelquefois si grande ; qu’elles se répandent sur toutes les parties du corps, entre cuir & chair. Alors il s’agit de les faire sortir au plus vîte, de peur que leur trop long séjour ne cause cette goute, rumatisme, hydropisie, paralisie, & toutes les autres maladies qui peuvent altérer la santé de l’homme. Pour cet effet, il faut donc ouvrir ces pores pas le moyen de la sueur ; mais il faut ensuite les