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à travers la suède

plaque de glace flottante du Vombsjö, changea de place et vint s’échouer sur la rive. Or il arriva que Smirre, le renard, qui demeurait alors à l’est du lac dans le parc d’Œvedskloster s’en aperçut pendant sa chasse nocturne. Smirre avait vu les oies sauvages dès la veille au soir, mais il n’avait pas espéré pouvoir en attraper aucune. Il se mit tout de suite en route. Les oies se réveillèrent, et battirent des ailes pour s’envoler, mais Smirre fut plus rapide. Il fit un bond en avant, saisit l’une des oies par l’aile et s’enfuit avec elle vers la terre.

Mais cette nuit-là les oies sauvages n’étaient pas seules ; il y avait parmi elles un homme, quelque petit qu’il fût. Le gamin s’était réveillé lorsque le jars avait ouvert ses ailes. Il était tombé, et se retrouva tout à coup assis sur la glace, encore ahuri par son brusque réveil. Il n’avait rien compris à cette alerte, avant de voir un petit chien, bas sur pattes, qui se sauvait à travers la glace, une oie dans la gueule.

Le gamin se précipita sur ses traces afin de reprendre l’oie au méchant chien. Il entendit bien que le grand jars criait derrière lui : « Prends garde, Poucet ! Prends garde ! » Mais Nils ne voyait pas pourquoi il devait avoir peur d’un aussi petit chien, et il continua à le poursuivre.

L’oie sauvage que Smirre emportait entendit le bruit des sabots de bois contre la glace, et elle n’osa en croire ses oreilles : « Est-ce que ce gamin penserait pouvoir m’arracher au renard ? » se dit-elle. Et quoiqu’elle fût en bien mauvaise posture, elle ne put retenir un petit gloussement tout au fond de sa gorge, qui ressemblait à un rire.

— D’abord il va tomber dans une crevasse, pensa-t-elle.