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à travers la suède

pas en avant. Il avait été ennuyé d’entendre le jars qui avait si bien répondu pour son propre compte, donner des réponses évasives lorsqu’il s’agissait de lui, Nils. « Je ne dissimule pas qui je suis, dit-il, je m’appelle Nils Holgersson, et je suis le fils d’un tenancier. Jusqu’à ce jour j’ai été un homme, mais ce matin… »

Il n’eut pas le temps d’aller plus loin. Dès qu’il prononça le mot homme, l’oie-guide recula de trois pas et les autres encore davantage. Et toutes elles tendirent le cou et sifflèrent, furieuses.

— Voilà ce que j’ai soupçonné dès que je t’ai vu sur la rive, dit Akka. Et maintenant va-t-en. Nous ne souffrons pas d’homme parmi nous.

Mais le grand jars s’interposa : « Ce n’est pas possible, dit-il, que vous, oies sauvages, vous ayez peur d’un être aussi petit. Demain il rentrera certainement chez lui, mais pour cette nuit vous pouvez bien le laisser parmi nous. Comment pourrions-nous laisser ce pauvret se défendre seul contre les renards et les belettes. »

L’oie sauvage s’approcha, mais avec une méfiance visible. « J’ai appris à redouter tout ce qui est homme, grand ou petit, dit-elle. Mais si tu réponds de lui, jars, il peut rester. D’ailleurs il est peu probable que notre gîte de cette nuit vous convienne, à toi et à lui, car nous allons dormir sur la glace flottante du lac. »

Elle pensait sans doute que le jars hésiterait à les y suivre. Mais il se contenta de dire : « Vous êtes sages de choisir un gîte aussi sûr. »

— Tu promets cependant qu’il s’en retournera chez lui dès demain ? ajouta Akka.

— Alors il faudra que je vous quitte aussi, dit