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le merveilleux voyage de nils holgersson

— Ah ! tu es la petite fille qui voulait arranger ce grand enterrement, dit-il avec bonté. Il ne faut pas le faire, mon enfant. Cela te coûtera trop cher. Si j’avais entendu parler de ce projet plus tôt, je t’aurais déconseillé…

Les traits de la fillette se contractèrent, et le directeur s’attendit à la voir fondre en larmes, mais elle se domina et dit :

— J’aurais voulu raconter à Monsieur le Directeur quelques petites choses sur le petit Mats.

— J’ai déjà entendu votre histoire, dit le directeur doucement. Il ne faut pas que tu croies que je ne te plains pas. J’agis pour ton bien.

Asa, la gardeuse d’oies, se redressa encore davantage, et dit d’une voix claire et nette :

— Depuis que le petit Mats a eu neuf ans, il n’a eu ni père ni mère, et a été forcé de gagner sa vie comme une grande personne. Jamais il n’aurait voulu mendier même un repas. Il disait toujours qu’il est indigne d’un homme de demander l’aumône. Il a parcouru le pays en achetant aux paysans des œufs et du beurre qu’il revendait ensuite, et il a fait ses affaires avec autant d’ordre qu’un vieux marchand. L’été, en gardant les oies, il apportait un petit travail aux champs. Les paysans de Scanie confiaient parfois au petit Mats, quand il allait de ferme en ferme, de grosses sommes d’argent, car ils savaient qu’ils pouvaient avoir confiance en lui ; on n’a donc pas le droit de dire que le petit Mats n’était qu’un enfant, il n’y a pas beaucoup de grandes personnes qui…

Le directeur avait les yeux fixés au parquet et pas un muscle de son visage ne bougeait. Asa la gardeuse d’oies s’arrêta, croyant inutile de continuer. Comme une dernière protestation elle ajouta :