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à travers la suède

table angoisse lui étreignait le cœur. Il lui semblait que sa vieille mère était à côté de lui, le suppliant d’être bon pour le « peuple des petits ».

— Je ne sais ce que le directeur t’en donnerait, Asbjörn, dit-il, mais moi je t’offre vingt couronnes si tu veux me le laisser.

Ébahi, le pêcheur regarda Klement, en s’entendant offrir cette grosse somme. Il se dit que Klement croyait sans doute le tomte doué d’un pouvoir secret et qu’il pourrait lui être utile. En outre il avait vaguement l’impression que le directeur serait moins généreux ; il accepta.

Le ménétrier fourra le tomte dans une de ses larges poches, retourna au Skansen, et entra dans une des cabanes où il n’y avait ni visiteurs ni gardien. Puis, ayant refermé soigneusement la porte, il saisit son prisonnier qui avait encore les pieds et les mains liés et la bouche bâillonnée, et le posa sur une table.

— Et maintenant écoute bien ce que je te propose ! dit Klement. Je sais que les êtres de ton espèce n’aiment pas à être vus des hommes, et qu’ils veulent besogner et travailler seuls. J’ai donc pensé te rendre la liberté, mais à la condition expresse que tu restes ici dans le jardin jusqu’à ce que je te permette d’en sortir. Si tu acceptes, tu hocheras la tête trois fois.

Klement regardait avec espoir le tomte, mais celui-ci demeura immobile.

— Tu ne seras pas mal ici, reprit Klement. Je te préparerai tous les jours un bol de nourriture et tu auras tant à faire que le temps ne te paraîtra pas long. Mais tu ne partiras que lorsque je te le permettrai. Nous conviendrons d’un signe. Tant que je mettrai ta nourriture dans un bol blanc, tu resteras.