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le merveilleux voyage de nils holgersson

surface durcie de la neige lui frottait les jambes, enlevant les poils et la peau.

« Les chasseurs sur leurs skis, et les chiens qui étaient assez légers pour courir sur la surface glacée, le poursuivaient toujours. L’élan fuyait, fuyait. Mais ses pas se firent plus incertains ; il trébuchait et soufflait violemment. Il souffrait cruellement et s’épuisait de fatigue dans la neige épaisse.

« Enfin il perdit patience. Il s’arrêta pour laisser les chiens et les chasseurs s’approcher et pour lutter avec eux. Tout en attendant, il jeta un regard vers le ciel et nous aperçut :

— Attendez-donc la fin, oies sauvages ! cria-t-il. Quand vous traverserez la forêt de Kolmârden, cherchez Karr, le chien, dites-lui que son vieil ami Poil-Gris a eu une belle mort ! »

À ce moment du récit, le vieux chien se leva et alla près d’Akka :

— Poil-Gris a mené une bonne vie, dit-il. Il me connaît. Il sait que je suis un chien brave, et que j’aimerais apprendre qu’il a eu une belle mort. Raconte-moi maintenant…

Il redressa sa queue et leva la tête pour se donner un maintien fier et courageux, mais s’affaissa vite.

— Karr, Karr, appela en ce moment une voix humaine dans la forêt.

Le vieux chien se releva de nouveau.

— C’est mon maître qui m’appelle, dit-il, et je ne veux pas tarder. Je l’ai vu tout à l’heure charger son fusil. Nous allons une dernière fois dans la forêt, lui et moi. Je te remercie, oie sauvage. Je sais maintenant tout ce que j’ai besoin de savoir pour m’en aller satisfait vers la mort.