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le merveilleux voyage de nils holgersson

« Puisque tu ne veux pas nous accompagner au temple, tu pourrais bien lire le prône à la maison. Me le promets-tu ?

— Oui, si vous voulez — il pensait bien ne lire que ce qui lui plairait.

Jamais il n’avait vu sa mère aussi prompte ; en un clin d’œil elle fut devant la petite étagère suspendue au mur ; elle y prit le sermonnaire de Luther, et le plaça sur la table, devant la fenêtre, ouvert au sermon du jour. Elle chercha aussi l’évangile de ce dimanche, et le mit à côté du sermonnaire. Enfin elle approcha de la table le grand fauteuil qu’on avait acheté l’année précédente à la vente du presbytère de Vemmenhög, et où d’ordinaire seul le père avait le droit de s’asseoir.

Le gamin songeait que la mère se donnait bien trop de mal pour cette mise en scène, car il ne lirait certes qu’une page ou deux. Mais de nouveau le père semblait deviner ses intentions ; il dit d’une voix sévère :

— Tâche de lire attentivement ; lorsque nous serons de retour, je t’interrogerai page par page ; gare à toi si tu en as sauté !

— Le sermon a quatorze pages et demie, ajouta la mère. Tu ferais bien de t’y mettre tout de suite si tu veux avoir fini à temps.

Ils partirent enfin ; de la porte le gamin les regardait s’éloigner ; il était comme pris au piège. Ils sont maintenant bien contents, murmura-t-il, de me savoir enfermé le nez sur un livre pendant toute leur absence.

Mais le père et la mère n’étaient pas du tout contents ; ils étaient au contraire très affligés. C’étaient de pauvres tenanciers ; leur domaine n’était guère