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à travers la suède

Nils au fond du grand trou. Le gamin se laissa tomber par terre comme épuisé de fatigue. Un si grand nombre de corneilles voletait autour de lui que l’air bruissait comme une tempête, mais Nils ne leva pas la tête.

— Poucet, dit la Rafale, lève-toi. Tu vas nous aider à faire quelque chose qui te sera très facile.

Mais Nils ne bougea pas. Il fit semblant de dormir. Alors la Rafale le saisit par le bras et le traîna sur le sable vers une cruche de terre de modèle ancien placée au milieu du trou.

— Lève-toi, Poucet, dit-il, et ouvre cette cruche.

— Laisse-moi dormir, répondit le gamin. Je suis trop fatigué pour rien faire ce soir. Attends à demain.

— Ouvre la cruche ! cria la Rafale en le secouant.

Le gamin se leva et examina la cruche.

— Comment moi, pauvre enfant, pourrai-je ouvrir une cruche pareille ? dit-il. Elle est plus grande que moi.

— Ouvre-la ! ordonna encore une fois la Rafale, ouvre-la, si tu tiens à la vie.

Le gamin se leva, s’approcha comme en chancelant de la cruche, tâta le couvercle, et laissa tomber ses bras.

— D’habitude je ne suis pas aussi faible, dit-il. Si vous me laissiez dormir jusqu’à demain, je crois bien que j’en viendrai à bout.

Mais la Rafale était impatient : il s’élança vers le gamin et lui donna un coup de bec à la jambe. Souffrir un pareil traitement de la part d’une corneille, c’en était trop : le gamin se dégagea brusquement, bondit à quelques pas en arrière, tira son couteau et le tint droit devant lui.