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le merveilleux voyage de nils holgersson

dans une telle rage qu’ils allaient se jeter sur le gamin et le déchirer. Mais Fumle-Drumle, riant et croassant, se posa devant lui.

— Non, non, non ! cria-t-il, comme épouvanté. Que dirait la Bourrasque si vous tuez Poucet avant qu’il nous ait rendu service ?

— Il n’y a que toi, Fumle-Drumle, pour avoir peur des femmes, répondit la Rafale, mais il laissa pourtant Poucet tranquille.

Bientôt après les corneilles se remirent en route. Jusqu’ici il avait semblé à Nils que le Smâland n’était point le pays désert et pauvre qu’il avait entendu décrire. Il y avait certes beaucoup de forêts et de crêtes de montagnes, mais autour des rivières et des lacs s’étendaient des champs cultivés ; jusqu’ici le pays n’était pas désert. Mais maintenant les villages et les maisons devenaient plus rares ; bientôt il ne vit que des marais, des landes et des collines couvertes de genévriers.

Le soleil s’était couché, mais il faisait encore grand jour, lorsque les corneilles atteignirent leur grande lande. La Rafale expédia en avant une corneille pour annoncer le succès de l’entreprise, et dès que la nouvelle fut connue la Bourrasque et plusieurs centaines de corneilles volèrent au-devant de Poucet. Au milieu des croassements assourdissants que faisaient entendre les deux bandes, Fumle-Drumle glissa à Nils :

— Tu as été si gai et si courageux pendant ce voyage que je t’aime bien. Aussi te donnerai-je un conseil : dès que nous arriverons, on te priera d’exécuter un travail qui peut-être te sera facile. Mais n’aie garde de le faire !

Quelques minutes plus tard, Fumle-Drumle déposa