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à travers la suède

C’étaient des Bons Templiers[1] qui revenaient d’une excursion. Il les reconnut à leurs bannières aux inscriptions d’or. Ils chantaient chanson sur chanson, et ne s’arrêtèrent point de chanter aussi longtemps qu’il put les entendre.

Nils ne put jamais depuis ce jour se souvenir de Gottland sans songer en même temps à des jeux et à des chants.

Un bon moment Nils avait regardé en bas ; tout à coup il leva les yeux. Qui pourrait décrire son étonnement ! Sans qu’il l’eût remarqué, les oies avaient quitté l’intérieur de l’île et volaient le long de la côte occidentale. La mer bleue et vaste s’étendait devant lui. Toutefois, ce n’était point la mer qui causait sa stupéfaction, mais une ville qui se dressait au bord de l’eau.

Nils venait de l’est, et le soleil avait commencé à descendre vers l’ouest. Comme on approchait de la ville, les remparts, les tours, les hauts pignons et les églises se dessinaient tout noirs sur le ciel illuminé. On ne pouvait en distinguer les détails, et au premier abord il sembla à Nils que c’était une ville toute pareille en splendeur à celle qu’il avait vue dans la nuit de Pâques.

Lorsqu’il fut tout proche, il remarqua que cette ville était à la fois semblable à la ville surgie de la mer et fort différente. Il y avait la même différence qu’entre un homme que l’on a vu un jour couvert de pourpre et de bijoux et que l’on rencontrerait le lendemain dans le dénûment et en haillons.

Certainement cette ville avait dû ressembler à celle qu’il évoquait. Comme l’autre elle était ceinte de

  1. Membres d’une société de tempérance.