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LOUISE LABÉ


vertu de ce temps était bien différent du nôtre. La virtu italienne est surtout un appel à la puissance, à l’individualisme affranchi de préjugés, à la joie païenne, au libre développement des instincts.

La beauté et l’amour passent alors avant toute autre considération morale, si bien qu’on en vient à glorifier les courtisanes et que, le style lyrique aidant, on vante leur chasteté et leur honnêteté au point que de simples lecteurs peuvent se faire illusion sur la qualité sociale des héroïnes aussi célébrées. Nombre de courtisanes vivaient alors à Lyon où l’argent, rapidement gagné, était plus vite dépensé. Beaucoup d’entre elles étaient fort adroites en l’art de faire des vers et de jouer du luth. Leur instruction était assez étendue et leur conversation digne des plus fins lettrés. Lorsqu’on parle d’elles on dit toujours « la très chaste, très honorable, très vertueuse dame » ce qui déroute un peu. Louise Labé fut-elle du nombre des cortigiana onesta ? On n’a aucune chance d’éclaircir la question. Le mieux est encore de puiser dans les documents du temps, comme le dit si bien M. Baur, « sans cette galanterie posthume et cette pruderie sentimentale qui ont si souvent faussé les jugements sur cette femme célèbre ».

On peut semble-t-il alléguer en sa faveur les