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de Virgile. La langue est un produit du sol, de la race, de la culture, du ciel, de la richesse économique d’un pays. Elle doit varier comme les vins et les fruits. Je ne vois pas la même parole latine, autour des mousses d’Ay, des muscats d’Alicante et des bières de Munich, je ne vois pas la même langue louangeant une cigarière de Séville ou une barmaid de New-Yorck. Langue morte, le latin convenait pour classer des fleurs mortes des herbiers. Pour la flore vivante, le savant lui-même prononcera le nom local, toujours pittoresque. Ceux-là même qui, comme moi, caressent le rêve d’une fédération latine et d’une renaissance méditerranéenne, n’osent s’arrêter à l’espoir d’une renaissance de la langue. Elle est morte après avoir été féconde, après avoir été la nef à plein-cintre de la civilisation. Ne la réveillons pas de son sommeil sacré. Elle a une fille qui la vaut bien et qu’il faut aimer.

Et voilà le premier tort d’une langue morte et surtout d’une langue artificielle adoptée comme langue universelle, c’est de faire méconnaître la culture actuelle, la langue nationale au profit d’une langue factice. C’est sacrifier le présent au passé ou à un avenir incertain. C’est le crime qui consisterait à sacrifier un homme de vingt ans sur