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OBSERVATIONS PRÉLIMINAIRES.


qui arrêtent presque à chaque pas le lecteur étranger à la connaissance de la langue sainte. La Vulgate latine surtout, qui assez ordinairement imite avec fidélité la concision du texte original, devient souvent par là même inintelligible, principalement dans le livre des Psaumes. Aussi est-ce pour faire mieux comprendre le sens de cette version à ceux de nos lecteurs qui n’ont aucune connaissance de la langue hébraïque, que nous signalons ici les hébraïsmes principaux, les mêmes que saint Augustin regardait comme si nécessaires pour bien entendre l’Ecriture, qu’il exhortait tous ceux qui l’étudiaient, à les apprendre et à se les rendre familiers (De Doct. Christ., lib. III). Par ce moyen d’ailleurs, nous serons dispensé de les expliquer dans les nombreux passages où ils se rencontrent. Or parmi ces idiotismes de la langue sacrée, les uns regardent plus particulièrement les noms, soit substantifs, soit adjectifs, soit pronoms, les autres les verbes, d’autres enfin les particules, c’est-à-dire l’adverbe, la préposition, la conjonction et l’interjection.

1o Les Hébreux, n’ayant point dans leur langue de genre neutre, le remplacent le plus ordinairement par le féminin. Or l’auteur de la Vulgate se conforme quelquefois à cet hébraïsme. — Les noms abstraits se mettent très souvent pour les concrets. — La répétition d’un même substantif au même cas avec ou sans la conjonction si, indique ordinairement ou l’universalité, ou un grand nombre, une multitude, ou une différence, une diversité dans l’espèce, ou enfin la vivacité du sentiment de celui qui parle. L’ensemble du discours fait distinguer facilement, dans chaque phrase, quel est celui de ces divers sens qui lui est propre. Mais, quand le substantif répété est mis la seconde fois au génitif, il tient lieu de superlatif, comme on va le voir un peu plus bas. — Les adjectifs sont souvent remplacés par un substantif précédé d’une préposition. — Les adjectifs qui indiquent une possession, une manière d’être, une habitude, et qui dans nos langues modernes sont pour la plupart dérivés du substantif dont ils indiquent la possession, se trouvent quelquefois remplacés par les mots fils, homme (filius, vir). — Le positif se met souvent pour le comparatif ; mais alors ce positif est suivi de la particule quàm. — Le comparatif s’exprime en hébreu par le positif suivi de la particule min, qui signifie plus que (præ) ; mais, comme cette particule signifie aussi de (ab, ex), la Vulgate la rend quelquefois dans ce dernier sens, lors même qu’il s’agit d’un comparatif. — Le superlatif s’exprime ou par les particules beaucoup, excessivement, extrêmement, ajoutées à l’adjectif, ou par un substantif répété et mis, la seconde fois, au génitif, ou enfin par le mot Dieu qu’on joint au substantif ; mais dans ce dernier cas, c’est le superlatif porté à sa plus haute puissance et qui doit se rendre en français par le plus, le plus possible. — Quant aux nombres, le singulier se met souvent pour le pluriel. — Les cas se mettent également l’un pour l’autre, sans égard pour la concordance latine. — Le nominatif se met souvent d’une manière absolue, c’est-à-dire comme détaché de la proposition, quoique son usage propre soit d’en caractériser le sujet. Cet hébraïsme n’est point un pur pléonasme, comme plusieurs l’ont prétendu ; il a pour but d’attirer l’attention principalement sur l’idée exprimée par le nominatif absolu, d’en faire l’objet dominant de la pensée de l’écrivain sacré. Le génitif marque assez souvent ou la fin qu’on se propose, ou l’effet qui est produit, ou le sujet dans lequel ou bien auquel on attribue quelque chose ou enfin la ressemblance. Le datif se met quelquefois pour la préposition contre (adversus, contra), et quelquefois aussi pour de,