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LA SÉPARATION DES ÉGLISES ET DE L’ÉTAT


empêcher qu’on ne les trouble et qu’ils ne troublent.

« Il faudrait cependant proscrire une religion qui n’admettrait pas la souveraineté nationale, la liberté, l’égalité, la fraternité dans toute leur étendue ; mais si un culte ne les blesse pas, et que tous ceux qui en sont sectateurs jurent fidélité aux dogmes politiques, qu’un individu soit baptisé ou circoncis, qu’il crie Allah ou Jéhova, tout cela est hors du domaine de la politique. »

On ne peut pas mieux dire. Nous sommes loin de l’opinion terre à terre de Cambon. Mais Grégoire, sans doute, péchait par le défaut contraire ; il perdait son époque de vue et disait la législation d’un siècle plus calme. Il réclamait que les autorités fussent chargées de garantir à tous les citoyens l’exercice libre de leur culte, en prenant les mesures que commandent l’ordre et la tranquillité. Mais permettre le libre exercice du culte, n’était-ce point déchaîner la fureur homicide du clergé contre la Révolution ? Néanmoins, l’Assemblée manifesta clairement, avant de passer à l’ordre du jour, qu’elle était assez détachée des religions pour laisser les prêtres à leur pratique, « à la condition, dit Legendre, qu’ils ne rétrécissent point l’esprit public ».

Les événements donnèrent raison à la Convention. Il n’était pas un point de la France où il ne fallut réprimer des émeutes cléricales, sinon des batailles rangées ; la messe était un acte subversif. Et ce ne fut que lorsque la Vendée, définitivement écrasée, réclama, comme une justice, la libre pratique des cultes que la Convention crut possible de détendre sa politique de défense révolutionnaire.

Le 21 février, elle étudia un projet de décret ne réglementant que la police des cultes. C’était tout un ensemble de garanties contre tout culte qui deviendrait exclusif ou dominant ; la liberté de cha-