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LA SÉPARATION DES ÉGLISES ET DE L’ÉTAT


assermentés, cédant à leur tendance ultramontaine, violèrent toutes les prescriptions de la loi, à plaisir, afin de la rendre inexistante. Ils ne tardèrent pas à atteindre leur but ; la Constitution, qui avait donné naissance à un nouveau clergé, maintenant eu révolte, n’était rien autre, à la fin de 1791, qu’un poids mort, qu’un monument législatif tout en façade, sans vertu, sans action, au nom duquel il fallait verser le sang, puisque l’Église en portant ses coups contiie la Constitution, visait en plein cœur la nation. Il est donc tout naturel que, dès cette époque, de bons esprits aient cru politique pour l’Assemblée de détruire elle-même son œuvre.

André Chénier, dans une lettre adressée au Moniteur, le 22 octobre, disait que les prêtres cesseront d’être dangereux le jour où la nation se désintéressera des religions ; « les prêtres ne troublent point les États quand on ne s’y occupe point d’eux ».

Le 6 février 1792, l’Assemblée législative demanda au ministre de l’Intérieur, M. Cahier de Gerville, un tableau général de la situation du royaume. Celuici lut, à la séance du 18 février, un exposé détaillé de l’état de la France. Ce qui avait trait aux troubles religieux occupe la majeure partie de son rapport ; et, en matière de conclusion, il exprimait de judicieuses pensées qui étaient le signe d’un nouvel état d’esprit :

Tout ce que peut faire une bonne Constitution, c’est de favoriser toutes les religions sans en distinguer aucune. Il n’y a point en France de religion nationale. Chaque citoyen doit jouir librement du droit d’exercer telle pratique religieuse que sa conscience lui prescrit, et il serait à désirer que l’époque ne fût pas éloignée où chacun eiit la charge de son culte. Le fanatisme est comme un torrent qui détruit et renverse toutes les barrières qu’on lui oppose, et