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LA SÉPARATION DES ÉGLISES ET DE L’ÉTAT

La mainmise de la papauté dans les affaires intélieures de la royauté franque ne s’établit pas cependant sans d’assez grandes difficultés. En face des prétentions romaines, il y eut, dès l’origine, une tendance de la nation à vivre de ses propres ressources et de sa propre pensée, à l’abri de toute ingérence extérieure. Mais, à l’époque qui nous occupe, cette tendance est encore hésitante et imprécise. La loi qui règle les rapports de l’Église et de la royauté franque est la loi du chaos. Nous avons remarqué que, à l’arrivée des Barbares, les évêques gallo-romains avaient une puissance administrative et judiciaire. Ils l’ont conservée. Il existe une juridiction ecclésiastique dont nous aurons l’occasion de parler et qui subsiste jusqu’au xviie siècle. Cette situation de fait, accrue encore par le prestige que leur donne la foi superstitieuse des peuplades barbares, propice à l’accroissement de leurs biens temporels, les rend puissants et redoutables. Mais ils ne sont pas encore placés sous la domination directe et impérative de la papauté. Théoriquement, les élections canoniques se faisaient alors par le peuple et par le clergé. Survivance de la primitive Église, le suffrage des croyants y maintenait encore dans les rangs du clergé le mouvement et la vie. Il est vrai que cette élection n’était qu’un des actes par lesquels était institué un évêque. Il fallait, par surcroît, la confirmation du roi et le consentement du métropolitain.

Telle était, du moins, la règle, mais en fait, on dut la rappeler fréquemment aux premiers rois, qui avaient inauguré un véritable droit de nomination directe. Saint-Rémi ayant consacré prêtre un certain Claudius, les évêques protestèrent, et saint Rémi répliqua qu’il avait agi ainsi par ordre du roi. L’évêque Quintinius meurt ; le roi ne reconnaît pas le nouvel élu. Il en nomme un autre. Nous empruntons à l’His-