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LA SÉPARATION DES ÉGLISES ET DE L’ÉTAT


un sens qui ne pouvait que plaire à Rome. Ils ne parlèrent plus de séparation, mais réclamèrent la liberté d’enseignement et la liberté d’association.

La monarchie de Louis-Philippe s’inféodant de jour en jour au clergé, on ne voit pas ce qui pouvait empêcher le Gouvernement de céder aux instances de l’Église. Le budget des cultes atteignait la somme de 34.491.000 francs en 1840 ; et il augmentait, chaque année, selon une proportion constante. Grâce à un nombre considérable de sociétés religieuses militantes, les associations s’emparaient de tout le territoire français. Les couvents et fabriques ouvraient leurs caisses aux dons et aux legs ; la « mainmorte », devenait formidable. Les congrégations non autorisées violaient la loi, sûres de l’impunité et essaimaient leurs établissements en tous les départements, en toutes les régions. On disait que les jésuites sortaient « de dessous terre » ; et, dès qu’ils apparaissaient en quelque endroit, c’étaient des acclamations enthousiastes. Les doctrines des disciples d’Ignace de Loyola formaient la substance de l’enseignement donné dans les écoles, religieuses. Une « Association catholique », composée d’éléments divers, se posait comme l’état-major de cette guerre à outrance contre la société civile ; elle encourageait les combattants et leur indiquait les tactiques pour démolir les institutions laïques et faire triompher Rome.

La mission des soldats du Christ était aisée, le Gouvernement lui-même ouvrant les portes aux ennemis de l’État.

Dès lors, grassement rente, officiellement protégé, libre de s’enrichir, le clergé eût été bien stupide s’il ne s’était plaint que la monarchie ne lui accordait pas les faveurs, les avantages auxquels il déclarait avoir droit. Selon ses dires, l’autorité laïque n’avait pas à lui mesurer ses libéralités ou, plutôt, la restitution des