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prendrez que le gouvernement a besoin du concours, de la bonne volonté, de l’assentiment dévoué de tous les républicains pour arriver à réaliser seulement ce qui est accepté par une progressive, mais prudente majorité.

Sachez que vous seriez à bon droit suspects si vous doutiez de la loyauté et des intentions des hommes qui sont actuellement au pouvoir.

Votre devoir évident est de les seconder et non de les entraver, de les soutenir et non de les paralyser.

Vos obsessions intempestives auront, comme tout choc, l’effet inévitable de les entraîner à dévier de la route qui conduit au but désiré.

Comment appelleriez-vous des passagers qui, n’ayant que de confuses ou contradictoires notions nautiques, et ignorant ou bravant les dangers, se rueraient incessamment sur l’homme expérimenté qui tient le gouvernail afin de le contraindre à manœuvrer selon leur fantaisie ?

S’il vous restait un peu de bon sens, vous appelleriez ces passagers des imprudents, des fous, peut-être des malfaiteurs.

Messieurs les intransigeants, vous êtes ces imprudents, ces fous ; la suite dira si parmi vous se trouvent des malfaiteurs. Nous ne proférons pas ici une injure, nous exprimons une crainte.

Si le pilote cède à vos injonctions, tout est perdu ; et le jésuitisme, flanqué à droite de son préféré, l’héritier de Clovis, et à gauche de son en-cas, l’héritier des Bonaparte — car il paraît qu’il se présente un prétendant pour revendiquer leur exécrable succession — est là pour ramasser l’épave.

Vous verriez alors s’il serait opportun de réclamer la translation en France des cendres des déportés morts en Nouvelle-Calédonie.

Mais qui sait, après tout, cette translation vous serait peut-être accordée, car parmi les os des combattants de la Commune dévoyée on trouverait sans doute ceux d’un des saints du jésuitisme — de celui-là même qui, avant de fusiller l’archevêque Darboy, s’est agenouillé devant lui et lui a demandé sa bénédiction.

L’ultramontanisme s’est sans doute très-promptement consolé de ce meurtre, en songeant que parmi les victimes de ce jour néfaste se trouvait le gallican Bonjean.

Il ferait toujours, au besoin, le sacrifice de trois des siens pour la suppression d’un seul de ses ennemis.

DZAN DE LA VELETTA.

Tahiti, le 10 janvier 1880.