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— Giovanni, les dépenses sont grandes dans la capitale ; ici nous sommes logés chez nous ; quelque argent, fruit des économies de Ludovic, nous suffisent, mais à Naples,

— À Naples, ma mère, mes œuvres seront connues. J’ai composé quelques intermèdes qui m’ont été payés, soyez sans crainte.

— Et quand notre départ ?

— Aujourd’hui même.

Sept ans s’étaient écoulés éepuis l’époque où Giovanni et sa mère étaient arrivés à Naples ; logés dans une hôtellerie de peu d’importance, ils vivaient bien médiocrement ; Ninetta surtout s’imposait des sacrifices, pour que Giovanni habitué à une douce aisance ne s’aperçût point du changement de vie. Mais la froide misère vint un jour les accabler. Vainement Ninetta vendit-elle beau costume de calabraise qui l’avait parée quand elle épousa Ludovic. En vain obtint-elle quelques florins pour la croix bénie qu’elle avait vouée à la madone. Le dénoûment se faisait pressentir ; et la pauvre femme ayant tardé de payer sa chambre et celle de son fils, l’hôte menaça de la chasser. Elle voyait approcher avec effroi le terme que lui avait fixé le dur italien et malgré les assurances de son fils, elle savait trop bien que Giovanni serait encore repoussé pour l’œuvre qu’il proposait au théâtre. Pour Giovanni, il éprouvait aussi des chagrins : son rêve d’avenir s’effaçait ; le découragement remplaçait cette sainte exaltation qui l’avait entraîné à Naples.

— Tu le vois, Logroscino, voilà sept ans qu’ils me repoussent ; l’inflexible Pistochi est là ; sa haine me poursuit, ou du moins il est l’instrument de mon plus grand ennemi. Tu n’es pas plus heureux toi, et sans ta grande gaîté…

— Courage, tu as fait un chef-d’œuvre ; nous te l’avons dit ; tu sais que le directeur de Saint-Barthéomelo nous a promis une audience…