nant pour exprimer les troubles et les agitations de la vie présente : quelle que soit la forme que prennent nos passions pour se révéler, leur marche est hardie, leurs mouvements sont heurtés. Les sociétés modernes ressemblent à une armée qui veille et marche incessamment. Point de repos pour l’esprit humain ; ce grand aventurier a besoin de quelque chose qu’il croit toujours entrevoir et qui sera peut-être l’avenir !… En attendant, on naît pour courir à la tombe sans s’être reposé : Eh bien ! l’art qui enseigne, l’art qui reste pour dire à nos enfants ce que furent leurs pères, l’art réflète toutes ces tribulations, tous ces rêves effacés ; et si un beau jour s’animant aux clameurs héroïques de la guerre ; si un beau jour chantant la liberté qui éclairait le monde, il entonna la Marseillaise, plus tard aussi, redisant les tortures affreuses, les déceptions et les égarements terribles qui brisent tant de pauvres femmes perdues et trompées, il jeta ce cri sublime que nous appelons la Folle ! …
Grisar, en composant cette romance, s’était imposé une rude et pénible tâche. Débuter par un chef-d’œuvre nécessitait ou un silence complet, ou des inspirations qui pussent soutenir le parallèle. Ces deux hypothèses étaient impossibles à l’auteur. Se taire, lorsque l’on voit la gloire devant soi, se taire lorsqu’ignoré la veille ; on a le lendemain la première place parmi les artistes de son pays ! Il faudrait alors que la même voix qui apprit vos succès annonçât votre mort… Grisar sut comprendre sa position ; il sut dignement soutenir sa fortune ; il ne céda pas aux conseils perfides qui souvent trompent le talent ; il sut attendre. Et s’il n’a pas donné un égal à sa haute et première conception, ce qu’il a composé certifie un respect profond et sincère pour l’art.
L’Arrivée du Régiment, pour qui veut apprécier ce qu’il y a de palpitant et de vrai dans l’attente incertaine de la mère, et de joie folle et inattendue dans la surprise de la sœur, en voyant
