ingénieusement qu’il les exposât. À mon avis, héritier, hœres, vient de hærere, tenir à… ; et passe-port, mot moderne, est formé du verbe passer et du substantif port.
Une des premières connaissances que je fis à Rennes, il y a vingt-cinq ans, fut celle d’un honorable professeur de littérature française ; C’était une célébrité locale, dont j’eus l’avantage de mériter l’estime par la complaisance que j’avais de l’écouter, ou de faire semblant de l’écouter. (Recette infaillible pour gagner l’estime et les suffrages de ceux qui croient avoir quelque chose à nous apprendre). Un jour, l’honorable professeur m’invita à dîner avec lui. Pendant ce dîner, qui me parut long, il me raconta l’origine prétendue du mot falbala ; celle, non moins fausse, du proverbe faute d’un point, Martin perdit son âne, et beaucoup d’autres que j’ai trouvées depuis dans divers anecdotiers. Une fois, je faillis manquer de respect au bonhomme, lorsque, parmi d’autres questions littéraires et grammaticales, il me posa gravement à résoudre celles-ci : Combien de fois le participe est-il employé dans la conjugaison française ? — Quel est le poète français qui a fait le plus grand nombre de vers, etc. ? » Il fallait me rappeler tout ce que je devais à l’âge et à la qualité de mon interlocuteur, pour ne pas céder à la tentation de plaisanter sur de pareilles questions. Parmi ses radotages, que je supportais avec une patience dont je ne me sentirais plus capable, il y avait quelquefois des traits instructifs. J’en citerai un qui offre de l’intérêt, en ce qu’il concerne l’un des plus célèbres poètes modernes, Joseph-Marie Chénier. Napoléon, pour gagner ce poète, qui ne voulut chanter que la gloire et jamais la puissance, le nomma inspecteur-général des études. En cette qualité, Chénier vint inspecter le Lycée de Rennes. Après avoir complimenté les professeurs sur leur zèle, leurs talents et le succès de leur enseignement, il ajouta : « Messieurs, ce qui m’étonne, c’est que tant d’hommes instruits que vous êtes ici, vous souffrez au-dessus de votre tête et aux yeux des passants une inscription ridicule, Lycée
