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Le supérieur fut reconduit avec le même mystère ; mais rien ne put lui apprendre quelle était cette femme, et si. ses paroles étaient l’effet du délire ou l’histoire de sa vie.

Cette pensée occupait frère Ambroise, et il ne sortit de sa rêverie que lorsque le guide lui adressa ces mots :

— Vous voilà rendu à votre couvent ; je vous avais promis que malgré vos craintes, rien ne vous ferait repentir de m’avoir suivi. Adieu mon père, et il disparut,

Les ombres s’étaient encore étendues sur le monde. Le sommeil donnait aux hommes cette existence mystérieuse, où les choses d’autrefois viennent en foule s’offrir à nos regards. Lorsque frère Ambroise rentra dans sa cellule, vainement il voulut prier, vainement il voulut livrer son corps au repos. Son cœur le ramenait toujours au même souvenir ; il semblait qu’une voix intérieure lui dit : Ambroise, je t’ai appelé pour ouvrir le ciel à une pauvre âme que les chagrins du cœur ont brisée ; mais ton œuvre n’est pas achevée : il y a un pauvre orphelin qui reste seul sur la terre : c’est à toi de le découvrir, c’est à toi que sa mère mourante l’a confié.

Oui, se disait-il, Dieu a permis que cette jeune femme, sans trahir son secret, me révélât ce qui a rapport à son fils. La providence a ses vues, ses actes sont toujours cachés : elle a sans doute réservé de grandes destinées à cet enfant, qui naît au milieu des larmes et de la souffrance. Frère Ambroise avait véritablement reçu l’inspiration divine !… Le jeune Giovanni que le sort semblait jeter à l’infortune, s’appellerait bientôt Giovanni Balista Pergolèse !…

FIN DU PREMIER CHAPITRE.