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À MON AMI B. C.


Oublieux du présent, il est doux, je le sais, de laisser aller sa pensée aux choses du passé et de s’endormir bercé par des songes célestes, entre les parfums des roses et les baisers maternels. Mais hélas ! tout sommeil n’a qu’un temps : si l’orage termine souvent un beau jour, si la fleur parfois cache un serpent, souvent aussi le réveil est affreux après ces songes d’or. Quand la mystérieuse rêverie vient se résoudre enfin dans une triste réalité ; que ces ombres séduisantes et vaporeuses qui nous charmèrent un jour passent en fuyant et se dissipent enfin ; que ces fleurs qui tout à l’heure ceiguaïent nos têtes, tombent à nos pieds sèches et fanées, qu’il est cruel alors d’entendre une voix impitoyable criant à nos oreilles : Réveille-toi ! Qu’il est affreux, Ô mon ami, de sentir toute illusion décue, de mesurer’de l’œil ce chemin de la vie qui mène au tombeau, et de retrouver cette vieille terre