Page:La Vallée-Poussin - Bouddhisme, opinions sur l’histoire de la dogmatique.djvu/17

Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.
5
bouddhisme et christianisme

ciens textes sacrés des bhikṣus et de nos Livres[1]. Mais, en vérité, je n’y peux rien voir d’inquiétant. Sans doute, je crois imprudent de nier que la légende bouddhique ait pu être connue en Occident avant notre ère ; mais je crois puéril d’établir la plus modeste conjecture au sujet d’emprunts qui ne sont pas strictement impossibles a priori, mais qu’on ne rendra jamais vraisemblables, encore moins certains. Il y a de certaines non-impossibilités qui ne séduisent que des esprits chimériques[2].

À notre estime, l’intérêt des études bouddhiques est très différent et d’ordre beaucoup plus général. La « mentalité » et la spéculation des moines fils de Çakya, valent, en elles-mêmes, d’être connues. « Après tout, dit joliment

  1. Le Bouddhisme et les Évangiles canoniques, dans Revue biblique, juillet 1906. — Voir E. Windisch, Buddha’s Geburt, chap. xiii.

    M. Sylvain Lévi s’exprime avec trop peu de modération dans La formation religieuse de l’Inde (Conférences au Musée Guimet, 1907) : « La morale bouddhique, propagée ou insinuée par un apostolat anonyme, pénètre jusqu’à l’Égypte et jusqu’aux régions méprisées où va surgir un enfant-dieu, destiné à la conquête du monde. L’univers semble travailler d’un élan unanime ; une œuvre de salut, sous les auspices du Bouddhisme » (p. 23 du tiré à part).

  2. Jamais on ne me fera croire que saint Luc ait eu en main une version araméenne du Suttanipāta : mais ce n’est pas « métaphysiquement » absurde. — Les comparatistes (unhistorical parallelists, dit M. Hopkins) ne s’aperçoivent pas que le problème, je ne dis pas la difficulté, consiste précisément dans ce fait qu’il y a des analogies ou des ressemblances sans lien historique. De ce point de vue, qui est le vrai, la question ne me paraît pas plus troublante ; je ne l’examine pas, car elle n’est pas du ressort de l’indianiste.