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Chap. II, 16.
Chap. III, 16.
ÉPÎTRE DE S. JACQUES.

est nécessaire chaque jour de nourriture, 16et que l’un de vous leur dise : “Allez en paix, chauffez-vous et vous rassasiez”, sans leur donner ce qui est nécessaire à leur corps, à quoi cela sert-il ? 17Il en est de même de la foi : si elle n’a pas les œuvres, elle est morte en elle-même.[1] 18Mais on pourrait même dire : “Tu as la foi, et moi, j’ai les œuvres.” Montre-moi ta foi sans les œuvres et moi, je te montrerai ma foi par mes œuvres. 19Tu crois qu’il y a un seul Dieu, tu fais bien ; les démons le croient aussi…, et ils tremblent ! 20Mais veux-tu te convaincre, ô homme vain, que la foi sans les œuvres est sans vertu ?[2] 21Abraham, notre père, ne fut-il pas justifié par les œuvres, lorsqu’il offrit son fils Isaac sur l’autel ?[3] 22Tu vois que la foi coopérait à ses œuvres, et que par les œuvres sa foi fut rendue parfaite. 23Et la parole de l’Écriture s’accomplit : “Abraham crut à Dieu, et cela lui fut imputé à justice”, et il fut appelé ami de Dieu. 24Vous voyez que l’homme est justifié par les œuvres, et non par la foi seulement. 25De même Rahab, la courtisane, ne fut-elle pas justifiée par les œuvres, quand elle reçut les envoyés de Josué et les fit partir par un autre chemin ?

26De même que le corps sans âme est mort, ainsi la foi sans les œuvres est morte.



III. — NE PAS CÉDER À L’AMBITION DE S’ÉRIGER EN MAÎTRES

Chap. iii. — a) Grave responsabilité de ceux qui ont charge d’enseigner (1-2). La langue et ses abus (3-12). — b) Qualités requises chez ceux qui veulent enseigner les autres : la vraie et la fausse sagesse (12-18).

Mes frères, qu’il n’y en ait pas tant parmi vous qui s’érigent en docteurs, sachant que nous serons jugés plus sévèrement. 2Car nous péchons tous en beaucoup de choses. Si quelqu’un ne pèche pas en parole, c’est un homme parfait, capable de tenir aussi tout le corps en bride. 3Si nous mettons aux chevaux un mors dans la bouche pour nous en faire obéir, nous gouvernons aussi leur corps tout entier. 4Voyez encore les vaisseaux : tout grands qu’ils sont et quoique poussés par des vents impétueux, ils sont conduits par un très petit gouvernail au gré du pilote qui les dirige. 5Ainsi la langue est un tout petit membre ; mais de quelles grandes choses elle peut se vanter ! Voyez, une étincelle peut embraser une grande forêt ! 6La langue aussi est un feu, un monde d’iniquité. N’étant qu’un de nos membres, la langue est capable d’infecter tout le corps ; elle enflamme le cours[4] de notre vie, enflammée qu’elle est elle-même du feu de l’enfer. 7Toutes les espèces de quadrupèdes, d’oiseaux, de reptiles et d’animaux marins[5] peuvent se dompter, et ont été domptés par l’homme. 8Mais la langue, aucun homme ne peut la dompter : c’est un fléau qu’on ne peut arrêter ; elle est remplie d’un venin mortel. 9Par elle nous bénissons le Seigneur et notre Père, et par elle nous maudissons les hommes qui ont été faits à l’image de Dieu.[6] 10De la même bouche sortent la malédiction et la bénédiction ! Il ne faut pas, mes frères, qu’il en soit ainsi. 11Est-ce que de la même ouverture, la source fait jaillir le doux et l’amer ? 12Est-ce qu’un figuier, mes frères, peut produire des olives, ou la vigne des figues ? Ainsi une source salée ne peut donner de l’eau douce. 13Qui parmi vous est sage et intelligent ? Qu’il fasse voir à l’œuvre dans la suite d’une bonne vie sa modération et sa sagesse. 14Mais si vous avez dans vos cœurs un zèle amer et un esprit de dispute, ne vous glorifiez point et ne mentez point contre la vérité.

15Une pareille sagesse ne descend pas d’en haut ; elle est terrestre, charnelle, diabolique.
  1. 17. Dans la suite du chapitre, l’Apôtre montre que la foi sans les œuvres est nulle (vers. 18), sans valeur morale (v. 19), inefficace (v. 20 sv.).
  2. 20. Est sans vertu, inerte. Vulgate est morte.
  3. 21. Gen. xxii, 9-18. S. Paul (Rom. iii, 28 et iv, 2 sv.), s’appuyant sur Gen. xv, 6, semble affirmer exactement le contraire. Mais le point de vue est différent : il ne s’agit ni des mêmes œuvres, ni de la même foi. S. Paul ne dit pas que ce qui justifie c’est la foi seule ; ce qui s’opposerait à la foi jointe aux œuvres : idée étrangère à son argumentation dans l’Épître aux Romains. Mais la foi est opposée aux œuvres, aux observances de la loi juive en particulier, en ce sens que la vertu justifiante est non pas dans la loi, dans l’œuvre in se, mais dans la foi. Évidemment il entend toujours une foi vivante, agissante, logique (comme Gal. v, 6). La question traitée par S. Jacques est différente. Suffit-il de croire et avec cela de ne pas se soucier d’accomplir la loi de Dieu ? Non, dit-il, ce n’est pas une foi spéculative qui est requise, une foi morte ; mais il faut une foi pratique, vivante, logique. Cf. Concile de Trente (sess. vi, cap. 10).
  4. III, 6. Le cours, m. à m. la roue de notre vie.
  5. 7. D’animaux marins ; Vulg., et d’autres animaux.
  6. 9. Une autre leçon : Dieu notre Père.