Page:La Saga du scalde Egil Skallagrimsson, trad. Wagner, 1925.djvu/74

Cette page a été validée par deux contributeurs.
— 44 —

de l’obscurité, avec ses hommes il remonta le fleuve à coups de rames pour attaquer la ferme qui appartenait à Hallvard et à Sigtrygg. Ils y arrivèrent avant l’aube, cernèrent l’habitation et poussèrent des cris de guerre. À ce bruit, les habitants s’éveillèrent et sans retard coururent aux armes. Thorgeir sortit précipitamment de la chambre à coucher[1], courut vers la haute clôture qui entourait la ferme, saisit de la main un pieu et s’élança dehors par-dessus la palissade. Non loin de là se tenait Thorgils Gjallandi, qui brandit son épée dans la direction de Thorgeir, atteignit sa main et la coupa sur le pieu. Là-dessus Thorgeir gagna la forêt, tandis que son frère Thord et plus de vingt hommes périrent. Toute la propriété fut livrée au pillage et la ferme incendiée. Ensuite on redescendit le fleuve pour rentrer en mer. Le vent leur était favorable et ils cinglèrent dans la direction du Nord, du côté de Vik. Là ils se trouvèrent de nouveau en présence d’un vaste bateau marchand, chargé de malt et de farine et qui appartenait à des gens de Vik. Ils l’attaquèrent, et ceux qui le montaient, ne se jugeant pas assez forts pour se défendre, se rendirent et débarquèrent sans armes. Thorolf et les siens prirent possession du bateau et de la cargaison et poursuivirent leur route. Thorolf avait donc trois bateaux lorsqu’il fit voile vers Foldin[2]. Il suivit la grande voie de navigation jusqu’au cap Lidandis[3], avançant le plus rapidement possible, pillant les promontoires qu’il rencontra sur son chemin et abattant, pour l’emporter, le bétail des rivages. Arrivé au nord de Lidandis, il s’éloigna davantage de la côte ; mais partout où il toucha terre, il se livra au pillage. Lorsque Thorolf se trouva à la hauteur des Firdir, il changea de direction pour aller voir son père Kveldulf, qui lui réserva bon accueil, et à qui il raconta les péripéties de son voyage d’été. Il ne resta là que peu de temps. Kveldulf et son fils Grim l’accompagnèrent jusqu’au bateau. Sur le point de se quitter, ils conversèrent ensemble et Kveldulf dit : « Il n’en a pas été autrement, Thorolf,

  1. L’isl. skemma désignait dans les pays scandinaves la chambre à coucher commune à tous les habitants de la maison.
  2. Foldin, désignant les régions qui entourent le golfe de Christiania, est employé par erreur pour Vík.
  3. Le cap Lindesnaes.