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LA SAGA
DU SCALDE
EGIL SKALLAGRIMSSON


1.

Kveldulf. Sa naissance et sa famille.

Il y avait un homme qui s’appelait Ulf ; il était fils de Bjalfi et de Hallbera, fille d’Ulf Oargi[1] et sœur de Hallbjörn Halftröll de Hrafnista, père de Ketil Häing. Sous le rapport de la taille et de la force, Ulf n’avait pas ses pareils. Pendant sa jeunesse, il se livra à la piraterie et aux entreprises guerrières. Il entretenait des relations d’amitié avec un homme du nom de Berdlu-Kari, personnage de haut rang et absolument supérieur sous le rapport de la force et de la bravoure ; c’était un « berserk[2] ». Ulf et lui avaient une seule et même bourse et entre

  1. Ces surnoms, empruntés à des particularités physiques ou morales ou à quelque fait marquant de la vie, avaient pour but de prévenir la confusion entre plusieurs personnages de la même famille et qui portaient le même nom : Ulf Oargi (l’intrépide), Hallbjörn Halftröll (le demi-géant), Ketil Häing (le saumon mâle), Eyvind Lambi (le petit agneau), Ölvir Hnufa (au nez mutilé), etc. Devenues héréditaires, ces appellations métaphoriques (kenningarnöfn) se changeaient fréquemment en noms propres.
  2. Le berserk, une des fictions les plus caractéristiques de la poésie des anciens Scandinaves, était une homme d’une force prodigieuse qui, dans l’ardeur du combat et obéissant à quelque stimulant artificiel, entrait dans une véritable fureur bestiale et accomplissait des exploits surhumains. Les berserkir se proclamaient irrésistibles et même invulnérables, ne craignant ni le fer ni le feu, poussant des hurlements sauvages, mordant dans leurs boucliers, les lèvres couvertes d’écume ; dans leur frénésie, ils n’épargnaient personne, pas même leurs parents ou amis.